Extrait de CPU release Ex0017 : Lost+found (volume 3), chronique originellement prévue pour CPU release Ex0007 : Noms de domaines.
Chers élèves,
Le cours d'histoire d'aujourd'hui portera sur les noms.
Le nom est l'unité de base du langage. Nom commun, nom propre, difficile de faire une phrase sans au moins un nom.
Le nom est diton aussi vieux que Mathusalem, patriarche antédiluvien évoqué dans la Bible.
En parlant de Bible, les religions se sont très vite approprié l'attribution du nom. Le baptême chez les chrétien, devint la cérémonie religieuse de l'attribution du nom. Dieu lui-même possède 12 noms dans la Bible judéo-chrétienne et 99 dans le Coran.
Pendant longtemps les gens ne s'appelaient par leur prénom commun, en Orient ils avaient éventuellement un nom de clan, tandis qu'en Occident, les noms de famille était réservés aux familles riches.
Nom de plume, nom d'auteur, l'art et les artistes commencèrent à utiliser des pseudonymes. Écrivains, comédiens, à l'image de Molière, de son vrai nom Jean-Baptiste Poquelin ou encore de Jean-Phillippe Smet alias Johnny Hallyday.
Arriva Internet avec ses adresses IP, ses noms de domaine. Mais encore et surtout ses pseudonymes, en effet avec le développement des premiers BBS, des chats IRC et les premiers forum, les gens ont tout de suite développé la pratique d'utiliser un pseudonyme pour leurs interactions en ligne.
Bien loin d'une volonté d'anonymat permettant toutes les transgressions, le pseudonymat permit aux premiers internautes de distinguer leur identité réelle de leur identité en ligne, et permit d'émanciper une nouvelle forme d'expression politique autant qu'une nouvelle forme d'activisme.
Mais avec l'avènement du web 2.0 à la fin des années 2000, les nouveaux Géants du Net, comprenez, des silos à données personnelles, allaient inverser la tendance.
Facebook le premier imposa d'utiliser son vrai nom, et même si la menace fut diffuse, de peur de faire fuir les gens, elle fut parfois mise à exécution obligeant les utilisateurs à scanner leur pièce d'identité pour l'envoyer au support technique. (Noraj de mon récupérage)
Je me permet d'évoquer alors l'humiliation des personnes transgenre, dont le sexe assigné à leur naissance ne correspond pas à leur genre, de même leur prénom d'état civil ne reflète pas toujours le prénom qu'elles ont choisi en rapport avec leur genre.
Google+ s'essaya au même exercice en faisant de l'utilisation du vrai nom une condition sine qua none, dès les premiers mois d'existence du réseau, ce qui contribua à le conduire un peu plus vite au sort qu'on lui connait.
#HashtagTirSurLambulance
comme on disait en 2014.
Les dirigeants politiques eurent également beaucoup de mal avec les pseudonymes, notamment lors de la consultation sur la Loi Numérique, où ils voulurent inviter au Ministère des contributeurs sous pseudonyme. Leur demandant leur état civil pour des raisons de sécurité (entrée dans le Ministère), toutes leurs propositions lors de la discussion qui suivit furent réécrites avec leur nom réel.
Mais revenons en aux noms de sites web au début d'Internet. Les noms de domaine sont pour beaucoup dans le succès d'Internet et du Web auprès du grand public et des sociétés commerciales.
Les sociétés commerciales y ont vu très tôt un intérêt à protéger leurs marques et à s'en servir dans leurs communication publicitaire. Ainsi fleurit au début des années 2000 les URL dans les publicités, phénomène jamais démenti même quand les URL se présentèrent sous la forme de QR-Code ou de tag NFC.
Mais pour les historiens que nous sommes, ce système pose un problème de pérénité. En effet, ces noms de domaine ne sont pas acheté, mais loués pour une ou plusieurs années, ce qui rendit le Web particulièrement volatile, plongeant toujours vers plus d'instantanéité et moins de contenu pensé pour durer.
Se posa aussi la question de la pérénité de l'identité en ligne. Les premiers utilisateurs d'internet délégua leur identité à des fournisseurs de services comme Gmail. Ainsi une adresse comme kevin@gmail.com
pouvait être redistribuée au bon vouloir du fournisseur, redistribuant ainsi toutes ses correspondances privées à un parfait inconnu.
La question qui se pose au travers du nom est celle de notre identité, et de la trace qu'ont laissé les individus à travers l'histoire grâce à leur noms. Jésus, Napoléon, Hitler, autant de noms qu'il n'est plus besoin de présenter.
Car au sommet de la pyramide de Maslow, la pyramide des besoins et des buts humains, on place souvent le désir d'éternité. Désir d'éternité encore irréalisable pour nous pauvres mortels mais possible à travers notre nom.
Auteur : Solarus
Illustration graphique : Moi moi
par Sanfrancisco99, licence CC0 via Commons.