Extrait de l'émission CPU release Ex0102 : Place locale des Linux User Groups.
Bonjour à toi, Enfant du Futur Immédiat, toi qui est en train de soupirer devant l'invite de grub
, dans la solitude d'une cryptique invite shell. Alors que mince, on t'a tellement dit que Linux c'était pas si compliqué !
Je dois te faire une confession : entre autres Crimes contre l'Humanité, j'ai été longtemps, trèèèès longtemps un prescripteur, ou plutôt un évangéliste des systèmes d'exploitations basés sur des logiciels libres. Quelle ne fut pas mon erreur !
Recommander et installer des logiciels libre entraine une responsabilité : celle d'assister dans la durée. Ben oui, contrairement à Microsoft Windows ou aux produits Apple, tu ne trouveras pas d'enseignes reconnues pour assurer le suivi après install. Et il faut reconnaitre que quand on cherche l'info sur internet, on trouve des réponses, mais pas toujours lisible pour qui n'a pas un master en shell bash.
J'ai été confronté à cette situation l'année dernière. Mes parents habitaient en région parisienne, et j'avais passé leur PC sous Linux afin de ne plus être importuné pour des histoires de virus… ou en tout cas un peu moins. Et il se trouve que mes parents ont décidé d'acheter une imprimante. Et que l'imprimante n'était pas configurable par les outils standards, ou plus exactement, sans le driver Windows proprio du fabricant.
Ne pouvant m'y déplacer, j'ai crû me souvenir qu'il y avait dans leur ville une association d'utilisateurs de Linux. Impossible d'en retrouver la trace sur le site de la mairie où j'avais trouvé l'info, bon, faut dire que le site a été légèrement
remanié suite à changement de majorité municipale. Je me dis qu'il doit bien avoir des réunions régulières de ce genre d'assos, outre le premier samedi du mois à la Cité des Sciences à la Villette… Je vais sur l'Agenda du Libre et… ben non, je ne trouve rien [d'accessible pour eux pour qu'ils puissent être dépannés]. J'écume des annuaires d'assos ou des sites spécialisés linux, je fais appel à mes contacts.
Rien. Strictement rien d'exploitable ou à jour.
On parle de Montrouge, une commune limitrophe de Paris, desservie par le métro. Alors oui, je sais, Paris est une plus petite ville que Toulouse si on compare leurs surfaces. Mais quand même !
Enfant du Futur Immédiat, je vais être honnête… Je suis tombé sur un os en préparant cette émission.
J'avais des souvenirs, vagues mais certains, d'avoir croisé une espèce de manifeste pour avoir des Linux Users Groups plus ancrés dans le local et hors des internets ; l'auteur les nommait Local Linux User Group
. Cela devait être vers 1998, et je me demande si ce n'était pas sur IRC plutôt que sur un newsgroup… En tout cas, y'a eu un moment une page web…
20 ans après, il m'est impossible de remettre la main dessus. J'avais bien une copie sur un disque dur, le même disque où j'ai miné quelques bitcoins quand ça valait que quelques centimes et qui m'a lâché… Mais c'est pas graaaaaaave.
bouhbouhou snif [[pleurer à chaudes larmes]]
ahem.
Reparlons des vagues souvenirs personnels de ce texte. Ce manifeste partait d'un constat particulièrement pertinent : à part les rencontres IRL (en chair et en os) qui permettaient à des gens déjà en ligne sur leur forum ultra-spécialisé de se rencontrer, il y avait paradoxalement de moins en moins de rencontres proprement identifiés, ouvert à toutes et à tous même à ceux qui n'avaient pas encore internet ou installé linux. Et ceci à un moment où Linux n'avait qu'une notoriété naissante. Ce qui voulait dire que pour adhérer à ces clubs sans connaitre personne, il fallait un ordinateur en état de marche. Mais que peuvent faire les personnes malheureuses qui n'arrivent plus à redémarrer leur bécane suite une installation plantée ?
L'idée soutenue était de revenir aux principes d'origines. Back to AFK
: Reprendre de la distance avec nos claviers. À l'heureuse époque où les clubs d'électroniques des années 1970s se sont mués en clubs d'informatiques ; où les gens se retrouvaient régulièrement à un endroit identifié, où un quidam pouvait venir, mais surtout l'information était affichée dans les mairies, les écoles, les commerces et les journaux locaux.
Enfant du Futur Immédiat, Linus Torvalds supposait dans une récente interview que l'extrême diversité et complexité du bureau Linux a ralenti l'adoption de l'OS au pingouin. Pour moi, il y a un autre problème : le manque de présence sur le terrain qui permette au néophyte complet de trouver un minimum d'aide. Or, sans bouée de secours, qui ne sait pas nager ne se jettera jamais à l'eau.
Tant que les zélotes ne l'ont pas compris, ils prêchent dans le désert.
Texte : DaScritch
Photo : Install party Toulibre du printemps dans le cinéma Utopia Tournefeuille, CC BY-SA-NC DaScritch