Extrait de l'émission CPU release Ex0143 : Le son laser.
Afin de transformer le Compact Disc en réel standard industriel, Sony et Philips ont rédigé de concert un livre sacré : The Red Book, dont la normalisation a été acceptée par la Commission électrotechnique internationale en 1989 sous la référence IEC 60908.
L'achat du Red Book n'entrait pas vraiment dans le budget de notre émission, voici ce que l'on peut dire du format :
Un Compact Disc Audio est enregistré en CLV (Constant Linear Velocity). La lecture se fait à 1,2 m/s linéaire, avec un débit de 150 ko/s, hors signaux de contrôles. Durant la lecture, le disque effectue entre 530 et 130 rotations par minute, selon la distance de la tête de lecture par rapport au centre du support.
Oui, le disque ralenti durant la lecture.
Celle-ci se fait du centre vers le bord extérieur du disque, au contraire du vinyle qui part de l'extérieur vers le centre. Cela permet à un lecteur CD de lire un support tant que le début de la partie utile, le lead-in, est positionnée exactement à 25 mm du centre du disque, et qu'importe si la galette fait 8 ou 12 cm de diamètre.
Pour un CD de 74 minutes, la spirale compte 22 188 spires. Je te laisse recompter…
Le CD Audio enregistre le son en stéréo dans un flux PCM linéaire. En gros, mot par mot, voies gauches et droites entrelacées, sans notion de fichier, juste un index primitif de début de piste dans la table d'allocation du disque.
Un Compact Disc peut avoir 99 index, donc 99 pistes, d'une durée minimale de 4 secondes chacune. Petite astuce : il est possible de faire démarrer la piste 1 bien après la première minute, une astuce utilisée pour certaines pistes cachées d'albums.
Dans le standard, un Compact Disc pressé est supposé avoir un identifiant unique de 12 caractères, le ISRC (International Standard Recording Code) délivrée par l'IFPI (International Federation of Phonographic Industry) et dont l'index fait toujours référence après Le Grand Chambardement du MP3.
Parlons de la lecture :
Le laser utilisé est un laser infrarouge à 780 nm. Ceci pour deux raisons :
- C'est un laser qui ne coûte pas trop cher à produire.
- En cas d'éblouissement accidentel (ou non), la rétine ne risque pas d'être brûlée dans une longueur d'onde visible, mais avec un risque pour le cobaye vivant de ne pas voir suffisamment vite qu'il est touché par un faisceau de lumière cohérente dangereux.
Sauf que dans les faits, la puissance du laser pour lire est de 1 mW, et la lentille est divergente pour que le faisceau se disperse par sécurité si la diode est allumée sans qu'un CD soit collé contre elle. Ces lasers sont de classe I donc sans danger by design.
La légende veut que lors de la conception du format, la durée du CD album fut étendue à 74 minutes pour contenir la Neuvième de Beethoven en entier… sauf que la réalité est que durant la conception, la durée maximale d'un Compact Disc fut réduite de 97 mn à 74 mn pour inclure les bits de contrôle d'erreur. Car il existe des bits de contrôle afin de palier aux éventuels soucis genre salissures, rayures, vibrations et erreurs de lecture, afin de continuer la lecture du disque avec un minimum de corrections. Deux systèmes sont utilisés :
- le codage EFM (Eight to Fourteen Modulation) pour l'enregistrement qui transforme les monts et vallées à la surface en bits,
- et le code CIRC (Cross Interleaved Reed-Solomon Code) pour la correction d'erreur qui tente de détecter et éventuellement recomposer un bit perdu.
Pour 74 minutes d'un son stéréo en 16 bits à 44,1 kHz, soit 1,41 Mbds comme déjà dit… On a un volume de données d'à peu près 700 Mo, une taille absolument gigantesque pour l'informatique de l'époque à un moment où les premiers IBM PC XT n'avaient que des disquettes de 320 Ko, et la mini-informatique d'entreprise, des disques durs d'une dizaine de méga-octets… Et si des bandes magnétiques atteignaient une telle capacité, elles sont très loin d'avoir la même célérité d'un accès aléatoire à une piste qu'un CD.
Et encore... les 74 minutes ne sont pas pas une limite absolue, car à partir de 1988, les mécaniques des lecteurs permettent de mordre sur la marge extérieure du disque de 12 cm, pour aller jusqu'à 80 voire 82 minutes de durée. Le record actuel pour un CD du commerce est de 86'30" pour un album de concerto de Mozart sorti chez Decca en 2016. À ce stade, la marge lead-out entre la piste de données et le bord extérieur du disque est minime, et le presseur du CD a joué à fond sur les tolérances dans le standard, comme les 10 % sur la distance entre deux spires et deux bits permises par le Red Book.
À côté du Red Book, il existe d'autres livres concernant le support CD, chacun ayant une couleur spécifique, la collection s'appelle informellement les Rainbow Book :
- Le Yellow Book décrit les CD-Rom ;
- le Blue Book décrit les CD audio avec une autre partition data, par exemple pour les CD-Text, ou les bonus type vidéo ou karaoké ;
- le Orange Book décrit les CD inscriptibles et ré-inscriptibles…
Et j'en passe, y'en a plein, on en verra certains en détail.
Texte : Da Scritch.
Image : Logo du consortium, D.R.