Extrait de l'émission CPU release Ex0188 : lost + found (volume 18, a brand new Tetalab).
Avec l’explosion du télétravail et des usages nomades, de plus en plus d’entreprises étendent leur offre de connectivité sans-fil, fournissant souvent une ligne professionnelle à leurs salariés sous la forme d’une carte SIM fournie avec ou sans terminal. Une question se pose alors : comment concilier ses usages personnels et professionnels sur un seul terminal ?
En effet, il peut être tentant pour des raisons pratiques, mais aussi économiques ou écologiques de vouloir centraliser tous ces usages sur un seul smartphone.
Pour les besoins de l’exercice, je vais exclure les cas où l’entreprise fournit un téléphone mono-SIM et exige l’usage exclusif de cet appareil avec une interdiction d’un usage personnel.
Ce qui nous intéresse ici c’est le BYOD (Bring your own device, utilisez votre équipeme,t personnel), le cas où un téléphone dual-SIM est utilisé avec une carte SIM personnelle et une carte SIM professionnelle.
Comment séparer les usages personnels et professionnels dans un tel contexte ?
Parlons d’abord du dual-SIM à proprement parler, c’est-à-dire de la double ligne. Sur Android cela dépend un peu des surcouches constructeurs mais il est assez facile d’installer 2 SIM en même temps, de leur assigner un rôle et de désactiver complètement une SIM, comme par exemple désactiver une carte SIM le soir une fois la journée de travail terminée.
Sur iPhone, le dual-SIM est disponible depuis l’iPhone Ten, et vous n’avez qu’un seul emplacement nanoSIM, la seconde SIM étant obligatoirement en eSIM (ou SIM virtuelle, sans puce physique à installer), ce qui suppose d’avoir une de vos deux lignes proposant ce mode d’inscription. La bascule d’une ligne à l’autre se fait au travers d’un menu assez clair, on peut regretter quand même l’absence d’un widget permettant de passer de l’une à l’autre depuis l’écran d’accueil.
Ceci dit, il reste une autre partie à regarder en détail, les applications. En effet aujourd’hui de plus en plus d’échanges professionnels passent par des applications : Outlook, Slack, Teams, Office, sans oublier le groupe Whatsapp entre collègues.
Deux problèmes se posent alors : le premier c’est le compartimentage entre les usages perso et pro, et l’autre c’est le droit à la déconnexion. En effet, rester 24 h / 24 connecté aux applications du travail, c’est risquer de ne jamais décrocher du boulot, d’être un workalcoholic, de perdre sa santé mentale, son conjoint et ses gosses, bref,… vous vous reconnaissez dans ce portrait ? Demandez de l’aide.
Sur Android, quand un téléphone est enrôlé correctement auprès d’un gestionnaire de parc, cela débloque le mode professionnel. Ce mode professionnel a deux avantages : d’abord il nécessite un code secret pour être activé, ce qui permet de sécuriser l’accès aux applications appartenant ce mode et d’éviter leur ouverture accidentelle lors d’une utilisation personnelle en dehors des heures de travail (ou quand on le prête à son gamin pour qu’il regarde la Pat Patrouille).
Je n’ai pas une connaissance exhaustive de l’écosystème Android mais il me semble qu’en termes de surcouche constructeur c’est Samsung qui gère le mieux ce système.
Sur iPhone, là encore on peut mieux faire que ce qui est proposé actuellement. Il est possible comme sur Android d’enrôler le téléphone auprès d’un gestionnaire de parc, et de télécharger des applications sur un magasin professionnel. Les applications professionnelles ne sont pas identifiées comme telles, il est donc impossible de les désactiver complètement en dehors des heures de travail. On peut donc se retrouver avec des conversations Teams qui s’ouvrent à 22 h alors que l’on joue à Raid Shadow Leg (Hein comment ça on n’a pas eu la sponso ?), bref que l’on joue à un jeu mobile tranquille le soir pendant que les gamins dorment.
Il manque donc sur iPhone un réel profil professionnel permettant de désactiver les applications professionnelles et permettant un usage personnel serein en dehors du travail.
Je me suis posé la question de savoir pourquoi Apple n'avait pas poussé plus loin les fonctionnalités de double-usage, et mon hypothèse c’est que cela ne fait pas partie de leurs cas d’usages, leurs use-cases les plus fréquents.
Mais il ne faut pas oublier une chose, un système d’exploitation, un OS doit être au service de l’utilisateur pour lui permettre de faire ce qu’il a besoin de faire. Un OS ne doit jamais forcer l’utilisateur à adopter des contournements, des trucs et astuces pour pallier les manques.
C’était vrai sur PC, ça l’est malheureusement de moins en moins sur smartphone.
Reste un problème commun aux deux plateformes : le compartimentage des données. En effet, qui dit double usage
dit que l’on va stocker ensemble les données de deux mondes différents. Comment faire pour éviter d’envoyer le dernier devis client à son banquier au lieu d’envoyer la procuration ? Comment faire pour éviter que votre femme ne tombe sur les photos de vous et Monique au dernier séminaire d’entreprise ?
La question reste ouverte que l’on soit sur Android ou iPhone.
Pour finir, que pouvons-nous conclure des possibilités de BYOD ? Je pense que sous Android vous pouvez tenter de tout avoir sur un seul téléphone avec les précautions d’usage habituelles, mais que sur iPhone il vous faudra un téléphone professionnel séparé quelque soit l’OS de votre téléphone personnel.
Votre conjoint et votre vie personnelle vous en remercieront.
Texte : Solarus
Illustration : I think my phone is spying on me, CC-By-SA ShellyS