Extrait de l'émission CPU release Ex0205 : Conférence technique, première partie.
Bonjour à toi, Enfant du Futur Immédiat, toi qui te demande pourquoi tonton il dépense des sous à aller voir des conférences dans d'autres villes, alors qu'elles seront disponibles gratuitement en ligne plus tard.
Oui, des fois, je prends une journée de vacances pour aller… à des jours de conférences où d'autres professionnels parlent de mon travail.
En fait, c'est comme l'école : tu vas dans des amphis, t'as de super profs, tu vas apprendre plein de chouettes trucs, y'a des récrés déguisées en pause café, y'a des TP passionnants avec de supers tuteurs, tu te fais plein de nouveaux copains avec qui t'échanges des cartes mais c'est pas des Pokémon. Si on m'avait dit y'a 40 ans que je paierai pour quelques jours de classe…
En gros, dans nos domaines informatiques, tu as plusieurs types d'événements :
- des événements sur des domaines d'usage, comme FLUPA UX days, A11y Paris ou Agile Tour,
- regroupées par langages, comme le Forum PHP, Djangocon ou MySQL Day,
- regroupés par chapelles technologiques, comme le FOSDEM, Google IO ou Apple WWDC.
Ce joli mois d'Avril, j'ai pu aller au Devoxx France à Paris et ensuite à la Toulouse Hacker Convention. J'avais le même sentiment qu'après Paris Web en septembre dernier et le Capitole Du Libre : ça me manquait.
Parlons de la Devoxx France : 4 jours d'un salon et de conférences principalement axés Java mais pas que. J'ai eu la joie d'y apprendre comment on développe un émulateur d'un ordinosaure, d'architecture hexagonale, des déboires de coder avec l'aide d'une IA
Devoxx est une grosse machinerie : une application mobile dédiée (qui te rappelle ce que tu veux voir), 200 conférences (donc faut bien choisir celles qu'on veut voir) et 70 exposants. Car oui, on peut plus parler d'un salon professionnel que de journées de conférences techniques.
Beaucoup de sponsors, beaucoup de stands, donc beaucoup d'argent en com', aussi bien pour vendre des services aux développeurs que pour recruter des développeurs. Et comment tu fais pour inciter des développeurs à discuter avec ceux qui tiennent un stand ? Ben ils offrent des goodies siglés à leur marque. Alors j'en ai vu plein : des stickers, des dés, des tee-shirts, des carnets… Et je dois dire que le goodies le plus in
que j'ai vu est le cache webcam siglé DGSE, ouais, les services secrets français. Ça claque.
Quand au goodie le plus claqué au sol tellement il est out
était… le cache webcam siglé Criteo, qui est une boite de ciblage publicitaire considérée par nombre de spécialistes en vie privée comme ultra-intrusive. Les mecs à se vanter de géolocaliser Emmanuel Macron quand il fait son jogging, les services de sécurité de l'Élysée s'en souviennent encore. À ce stade, ils auraient mieux fait d'offrir un cache webcam transparent, c'était plus réaliste.
Par contre, faut vraiment que les stands arrêtent de faire gagner des boîtes de Lego. Oui, sérieux, quasiment chaque stand sur les 70 présents au Devoxx France organisait un concours avec une boîte de Lego à faire gagner. Non mais sérieux, je pensais que les développeurs Java étaient adultes. Bon, j'ai même pas joué, et pourtant, j'ai un sujet Lego dans le bac de CPU depuis des années.
La semaine suivante, j'étais à la Toulouse Hacker Convention, ou THCon. C'était à l'université Paul Sabatier, là où 30 ans auparavant, je m'amusais avec d'autres hackers dans l'herbe (j'ai pas précisé laquelle). La THCon dure aussi 4 jours, dont deux jours de conférence technique et une journée de jeu capture the flag
. La THCon a fusionné avec les journées sécurité de l'INSA, l'organisation est bien plus modeste, quand on compare à la Devoxx France. Et toutes les présentations furent en Anglais. Il faut dire que des orateurs étaient purement anglophones, ça n'aurait pas été sympa de ne pas leur faire découvrir comment nous, les français ont parle anglais, surtout avé l'assent toulousaing. hein.
Une belle montée en gamme avec de chouettes présentations. J'ai découvert comment des universitaires tentent de tricher dans un jeu de combat à plusieurs sur PS5, comment Renault redéfini l'informatique automobile pour mieux prévoir les mises à jour, combien le système de chargement de DLL dans Windows est pété, et comment faire sauter des bits en mémoire rien qu'en l'a lisant.
Un seul track de conférences, mais vraiment qualitatif, je ne m'y suis pas ennuyé, et retrouvé quelques copains.
Enfant du Futur Immédiat, il faut que je te dise pourquoi j'y vais. Parce que je coupe du travail habituel, mon smartphone est sur silencieux et le PC n'est pas ouvert sur les applis de travail. Et plus important : j'y retrouve IRL (en chair et en os) les amis de 5 minutes, ceux qu'on ne voit que via nos messages sur nos réseaux sociaux, via les commentaires sur nos billets de blogs. Et avec qui on sera trop ravi de revoir et d'aller boire et discuter et de refaire le monde en appliquant les standards.
Entre autres Crimes contre l'Humanité, j'ai été chroniqueur en bandes-dessinées sur cette antenne, et pendant une dizaine d'années membre de l'ACBD, l'Association des Critiques de Bande-Dessinées, qui récompense chaque année des œuvres qualifiables de Neuvième Art, et qui propose aussi des études de qualité, sur la santé économique du secteur. Tous les ans, j'allais au Festival International de la Bande-Dessinée à Angoulême. Et si y'a les stands des grands et petits éditeurs, les expositions spectaculaires, il y a aussi dans les backstages le plaisir de revoir tous les ans des amis, d'autres critiques, des auteurs, des éditeurs, des négociateurs de droits, des universitaires, des conservateurs de musée…
Ce sont des amis de 5 minutes. Des amis de galère dans un secteur difficile, compliqué pour 80 % des créateurs, mais animés d'une même passion. Et le temps d'un week-end allongé d'insomnies, on délaisse les mauvais côtés du quotidien pour célébrer nos passions dans des discussions enflammées.
Enfant du Futur immédiat. Je dois t'avouer que si ces derniers temps, j'ai été moins régulier dans mes émissions radio, c'est que j'avais le moral un peu dans mes chaussettes. Là, ça va mieux, et le fait d'aller à des salons professionnels, d'assister à des conférences techniques et d'échanger avec des confrères qui ont un niveau fabuleux par rapport au mien, mais qui sont super sympas… ben… Cela me rappelle que nous sommes passionnés par nos métiers, que nous sommes dans les 1 %, ceux qui investissent beaucoup dans leur temps pour continuer d'apprendre et de progresser. Et que dans notre petite coterie, on aime aussi célébrer notre passion partagée, même si c'est loin d'être rose tous les jours au travail.
Texte : Da Scritch
Photo : Audience de la conférence THCon en 2023, CC-By-SA Da Scritch