Extrait de l'émission CPU release Ex0136 : Traitements du son.
Bonjour à toi Enfant du Futur Immédiat, toi qui maintenant a un peu compris ce qu'est qu'un décibel, un bit de musique et les joies du Dolby 5.1.
Dans le premier épisode de notre série « Vers la radio numérique », j'ai lu la question d'un auditeur audiophile qui se demande pourquoi les radios ne proposent pas un flux sonore en très haute qualité. Pour donner des bases, j'ai parlé un petit peu de notre audition, de prise de son, et aussi des dimensions du son numérique.
D'ailleurs, petit aide mémoire : numériser le son à 44,1 kHz, la fréquence d'échantillonnage du CD, permet de reproduire des sons à à peu près jusqu'à 20 kHz, et le faire avec une résolution de 16 bits donne une amplitude d'environ 100 dB, la plage de sensibilité d'une oreille humaine.
Le faire sur 17 bits, donc doubler le nombre de valeurs possibles, donne une amplitude en décibels de… de… non, pas 200 dB… Eugène, tu suis pas là ! Si tu doubles, tu ajoutes 3 dB, ça te fait 103 dB.
Bref, le matériel professionnel se gargarise d'une précision sur 24 bits en 96 kHz. Donc pouvoir restituer des sons allant jusqu'à 45 kHz de fréquence sur avec une précision de 140 dB [erreur, j'ai dit 130
]. Donc avoir la sensibilité jusqu'à 60 milliardième de volt (0,000 000 06 volts).
MMMMHhhhhhh
Probablement pas réaliste.
Alors pourquoi les professionnels paient parfois fort cher du matériel qui utilise de telles valeurs ? Un tel procédé overkill s'appelle la surrésolution
. En soit, on ne captera pas forcément mieux le son des micros, mais comme le technicien audio va appliquer énormément de traitements sur le sonore capturé avant et après le mixage, on va éviter que des artefacts de traitements apparaissent avant que le résultat mixé soit envoyé à la diffusion.
Car si on étire certaines dimensions du son par nos traitements, alors oui, on pourrait avoir des effets d'escaliers, des déformations audibles dues à une résolution insuffisante, soit en fréquence, soit en amplitude.
Tu sais, un peu comme les gros blocs dégueus dans les aplats rouges des JPEGs très compressés.
Non, tu ne vois pas, on fait de la radio. Merci de me le rappeler.
En fait, dans le traitement de son, on a exactement les mêmes problématiques qu'en sécurité informatique : les défauts vont apparaître dans le maillon faible, et vont rendre fragile l'ensemble de ta chaîne. Si à un moment, le son que tu travailles est devenu crade, t'auras beau faire, tu ne pourra pas ré-obtenir les détails du son d'origine.
Enfant du Futur Immédiat, en te rappelant de l'intro de la première émission de cette série, tu te dis que si la question était de faire de la radio pour des audiophiles, et que le but est d'avoir le meilleur son possible.
Oui mais… avoir le meilleur son possible
, qu'est-ce que cela veut dire ? Avoir le son le plus pur et le plus naturel possible ?
Eh ben figure-toi que non. Le travail de l'ingénieur du son ne se limite pas à pousser le potard de volume, à mettre plus de basses et d'aigu, mais il travaille sur nettement plus de subtilités ; où notre principal outil de travail, notre oreille, peut facilement nous trahir.
Pratiquement toutes les radios, voire même tous les enregistrements commerciaux, sont retraités ; le son est volontairement dénaturé plus ou moins subtilement, voire carrément crâdé.
Et ensuite, il y a la question de comprimer le signal audio dans un débit numérique, donc l'épineuse question des codecs de compression numérique. Ce qui se cache derrière les mp3, le mp4, l'AAC, le Ogg Theora, tous ces noms qui abreuvent nos smartphones, nos albums légalement ou pas acquis, leurs avantages,… leurs partis pris,… leurs défauts.
C'est sur ces points-là que la question de notre auditeur révèle ses subtilités : Est-ce que les réglages qui sont choisis par les radios streamées ou même en interne pour leur productions, pourraient être plus généreux en débit ? Quid des sources disponibles, des traitements effectués au son avant et au mixage, des codecs, et des traitements possibles pour rattraper les dégâts ?
T'as pas suivi ? J'ai parlé trop vite sans respirer ?
T'inquiète, Enfant du Futur Immédiat ! On va y aller sur chaque notion doucement, progressivement, avec des exemples, des cas concrets… et au moins, on espère que dans le voyage d'une émission de radio, tu vas découvrir tout ce qu'implique de travailler le son.
Texte : Da Scritch
Illustration : A beautiful girl listening to music with headphones par Petr Kratochvil, distribué en domaine public par freestockphotos.biz, détail.