Extrait de l'émission CPU release Ex0144 : Lockpicking.
Bonjour à toi, Enfant du Futur Immédiat, toi qui aimerait bien arriver à ouvrir le placard du fond, là où y'a tes bonbons et ta console de jeu qu'on t'a confisqué à cause de tes mauvaises notes.
Ah que je te vois venir, à tenter de faire comme dans les films : j'entre un trombone un peu tordu, je tourne un petit peu, et… voilà ! la porte s'ouvre en grand.
Ah ? Tu n'y es pas arrivé ?
Ré-essaie encore.
Plus tard, tu feras des soirées entre camarades de jeux de rôles ou de baston médiéval-fantastique où tu découvriras que le triptyque Porte→Monstre→Trésor est un ressort fondamental du suspens. Encore plus tard, tu seras surpris de l'analogie clé+serrure avec certaines activités nocturnes et l'importance du guili-guili pour dégripper certains mécanismes, mais tu es encore trop jeune pour comprendre (et je vais me faire disputer par ta mère).
Donc cette satanée serrure qui résiste, elle ne sera ni la première, ni la dernière avec laquelle tu vas un peu t'amuser. Tu vas tenter de jouer avec un trombone, puis deux, puis un tournevis tordu et une petite giclée de WD40, elle va bien finir par s'ouvrir, non ?
Et pendant que tu t'escrimes avec tes petites piques, on va parler de réflexion out of the box
.
Une bonne serrure ne fait pas tout : On ne compte pas le nombre de fois qu'une porte a été forcée en la découpant autour de la serrure. Alors pour y palier, on va remplacer la porte en bois de caisse par une porte blindée. Oui, elle est bien plus lourde, mais au moins, le malandrin ne peut plus la découper avec une scie à bois.
Mais bon, quelle utilité y-a-t-il à poser une porte armée de 5 mm d'acier avec une serrure à 7 points d'accroche si le mur est en placoplâtre BA10 ? Inutile de te dire que quelques coups de masse permet à n'importe qui d'entrer sans passer par la porte : toc ! toc ! toc !
(ça fait pas exactement ce bruit, mais plus celui d'un mur qu'on défonce) y'a quelqu'un ? Ah ben c'est ouvert, entrons !
Donc le responsable sécurité de l'appart va aussi consolider le mur. Et il pourra toujours s'époumoner, l'homme au loup, sur ta cahute qui était en paille-puis-en-brindille, maintenant que tu as reconstruit ledit mur porteur de la porte en parpaings et fer à béton.
Sauf que, une serrure, une porte et un mur bien solide, voir tous les murs, et le sol et le plafond, c'est bien beau, et un poil coûteux, mais toutes ces précautions sont inutiles si une fenêtre accessible est laissée ouverte… ou que quelqu'un de mal réveillé laisse la clé sur la serrure.
Bref.
Une fois de plus, l'élément le plus faible n'est pas forcément dans la serrure, la porte ou les murs, mais dans la discipline des usages.
En sécurité physique, tout comme en sécurité informatique, ce principe est immuable : Ce qui détermine la fiabilité et l'inviolabilité d'une mesure de sécurité, c'est son point le plus fragile, le Maillon Faible.
Et bien souvent,… il est humain.
Des fois, le moyen le plus simple pour entrer dans une pièce fermée sans en avoir la clé, c'est l'étourderie des autres.
Enfant du Futur Immédiat, on apprend beaucoup en informatique du crochetage de serrure. Pour faire moderne, tu seras peut-être tenté par la serrure à code mécanique, à code numérique, à carte, à biométrie… Mais elles aussi ont leur petites faiblesses… qui les perdra.
Texte : Da Scritch.
Photo : Sculpture de Marcel Aymé d'après sa nouvelle « le Passe Muraille », sculptée par Jean Marais. D.R., via orangesmile.com