Extrait de l'émission CPU release Ex0167 : Design embarqué en laboratoire de biologie.
Bio is the new black invite artistes, designers, philosophes, scientifiques et ingénieurs à explorer les multiples questions éthiques, critiques et de créations qui se posent avec les technologies de bio-fabrication.
Aujourd’hui, nous partageons une interview avec Marguerite Benony. Nous sommes au CRI, Centre de Recherche Interdisciplinaire de Paris. Merci de cet accueil chaleureux malgré la situation compliquée.
- Première partie : Designeuse-ethnographe en contrée de biologistes
- Tout d’abord peut-être déjà une question de positionnement, qu’est ce que ça apporte, change, fait importer, le fait d’être designeuse et ethnographe dans un tel milieu ?
- Comment est-ce que tu t’y prends concrètement pour étudier ce terrain ?
- Deuxième partie : Collaborations asymétriques
- Dans un article « From guests and guides to collaborators : Negotiating roles in design and biology collaborations » que l’on peut traduire en français par « Négocier des rôles dans les collaborations en design et biologie : depuis les invités et les guides jusqu’aux collaborateurs » que tu as co-écrit avec Nolwenn Maudet et qui est paru en mai 2020 dans la revue scientifique The Design Journal, vous revenez sur une forme d’asymétrie que vous avez observés dans les rôles et postures entre designer & biologistes. Ces collaborations vous les avez observé d’un côté à Paris et de l’autre à Tokyo, et ce qui revient le plus souvent c’est que les biologistes sont des guides pour les designers qui deviennent les invités pour un temps dans le laboratoire de biologie. Dans ce cadre, la relation est quelque peu déséquilibrée et/ou asymétrique, puisque les biologistes qui ont la connaissance de leur discipline et agissent comme des influenceurs voire les décideurs scientifiques des projets mis en place. Il y a un phénomène que vous explicitez à la fin de l’article que je trouve particulièrement intéressant, qui est l’exclusion totale du biologiste à la fin du projet quand les designers sont en phase de production, dans le cadre précis ici, à savoir, d’une exposition qui a eut lieu à la fin des collaborations. Vous soulignez comment les designers s’emparent du processus tandis que les biologistes sont garants du contenu.
- Je me demande à titre personnel à quel point l'autorité du sachant, du scientifique, au fond l’autorité que l’on prête à la science elle-même ne joue-t-elle pas un rôle important dans cette dynamique. Mais aussi en quoi l'âge et le sexe des participants jouent potentiellement un rôle dans la dynamique de prise de décision autour des projets ? Tu me confiais que cet article a été largement retravaillé pour les besoins de la revue. Qu'est-ce que vous aviez envie d'y mettre au départ ? Disons quelle en était l’intuition première ?
- Est-ce que vous vous êtes demandées comment on peut éviter cette asymétrie ? Comment est-ce que vous avez perçu de votre côté le fait que les collaborations aient pour la plupart d'entre elles conduit à l'éviction des biologistes dans leurs phases finales ?
- Les projets étudiés étaient relativement court surtout en comparaison des projets de biologie, et effectivement je trouve pertinent que vous soulevez ce point, étant moi-même intégrée dans un laboratoire de technologie depuis maintenant deux ans, je vois à quel point il peut être long de mener des projets collaboratif. Se donner la légitimité de faire et définir sa posture devient au fond le plus important : se situer.
- On a déjà eut l’occasion de discuter un petit peu ensemble à d’autres occasions, et je sais qu’une partie de tes recherches visent à transférer les outils utilisés par les designers dans les labo de bio, qu’est-ce donc que ces outils et comment est-ce que tu envisages leur déploiement ? Est-ce que cela passe par l’intégration de designers sur du long terme dans ces espaces-là ? D’ailleurs quand je dis
espace
, il y a tout lieu de croire que cette question même de ce quifait
laboratoire n’est pas si évidente que cela.
- Troisième partie : voir la biologie comme une discipline plus qu’un matériau
Interview : Élise Rigot
Photo : portrait fourni par l'interviewée. D.R.