Extrait de l'émission CPU release Ex0171 : Alerte de sécurité civile.
Durant la Seconde Guerre Mondiale et la Guerre Froide qui y a succédé, la radio était le deuxième pilier de l'alerte civile après les sirènes. Aux États-Unis, comme il n'y a pas de radio publique mais une multitude de radio privées, il fallait lier la licence de la fréquence concédée par l'état fédéral aux entreprises par des missions dites de service public
comme diffuser au moins une heure d'information locale. Mais on restait sur le bon vouloir du diffuseur pour, par exemple, relayer des communiqués du gouvernement.
Et durant cette période, les militaires du Pentagone avaient aussi peur que les bombardiers soviétiques utilisent les fréquences des différentes stations de radio locales pour s'orienter, se repérer et bombarder certaines villes à coup sûr. En 1951, le président Harry Truman passe une loi pour faire évoluer les alertes civiles radio à l'ère atomique : le ConElRad, pour Control of Electromagnetic Radiation
.
Donc la solution, qui à part quelques exercices, ne fut heureusement jamais appliquée, était de faire couper par toutes les radios et télévisions leur émetteur, et de n'émettre que sur une fréquence unique à l'échelle de tout le continent. Bon, en fait, deux fréquences en Ondes Moyennes : 640 kHz et 1 240 kHz, qui étaient servies par une multitudes d'émetteurs synchronisées sur le territoire.
Ces fréquences étaient appelées ConElRad, et devait obligatoirement être indiquées par un logo triangulaire CD
sur tout poste de radio vendu aux États-Unis. Parmi les avantages de ce système, on peut noter que :
- les citoyens avaient deux fréquences à écouter et indiquées sur les appareils récemment vendus ;
- ces deux fréquences était servies par plusieurs émetteurs synchronisés donc si un émetteur est coupé ou vaporisé, on peut toujours écouter les émetteurs voisins sans forcément avoir à ré-accorder le récepteur ;
- et en créant une espèce de nappe de fréquence uniforme sur le territoire, avec tous les autres postes coupés, empêcher les opérateurs gonios ennemis de se caler sur l'un d'entre eux pour atteindre une cible.
En 1963, le système ConElRad fut abandonné car le développement des missiles balistiques permettait aux militaires de cibler un objectif sans référentiel extérieur. Couper donc toutes les radios et télévisions était contre-productif pour les populations civiles. Son successeur, le Emergency Broadcast System (EBS) n'était plus sous contrôle militaire, mais civil et conçu pour informer sur des situations locales comme les alertes météos ; l'autorité américaine des fréquences, la FCC, proposa aux diffuseurs (les radios AM, mais aussi FM et télévisions) de participer sur la base du volontariat à un système d'alerte par bulletins et décrochages. Pour les exercices, certaines radios se permettaient de produire des jingles… eeeuuuuh… funky.
L'EBS est remplacé en 1998 par l' Emergency Alert System, EAS, qui comporte notamment les Amber Alert, les alertes enlèvement d'enfants, dont s'inspire le système Alerte Enlèvement en France.
Le système d'alerte américain actuel utilise notamment des messages numériques encodés dans le son de l'alerte, le Specific Area Message Encoding (SAME), pour prévenir les autres radios et télévisions locales qu'une alerte est en cours et de basculer leur programmes automatiquement (démonstration sur un récepteur de télé par cable). Évidemment, il est interdit d'utiliser de tels signaux en dehors d'une autorisation spécifique de type exercice, sinon vous perturbez les programmes radios et télés sur toute une région, Ce qui est arrivé avec une publicité pour le film « La Chute de la Maison Blanche ». Les autorités fédérales n'ont pas apprécié du tout.
L'actuel système EAS est aussi fonctionnel pour les chaines par satellite et par câble, et intègre depuis 2012 la diffusion par SMS Cell-Broadcast (SMS-CB), dont nous parlerons prochainement.
Texte : Da Scritch
Illustrations sonores : Conelrad Drill: July 20, 1956, 1975 WHEN-Syracuse Emergency Broadcasting System test jingle, audio recording of the National Emergency Alert System Test on November 8, 2011, D.R.
Photo : Flyer d'information sur les fréquences ConElRad, CC-By-NC-SA James Vaughan, détail