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Artefact du passé : Héliophore

jeudi 23 juin 2022. Chroniques › Artefact du passé

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Extrait de l'émission CPU release Ex0191 : lost + found (fin de saison printemps 2022).

Quand j'étais petit collégien, la couverture d'un livre de la saga « Dune » de Frank Herbert que j'ai jamais vue m'a littéralement fasciné. Autant que cette œuvre fleuve qui conte le destin d'une humanité qui a colonisé la galaxie tout en ayant banni tout ordinateur sophistiqué.

J'ai découvert les romans de Frank Herbert non pas en format de poche, mais en format digest, 13 par 21 cm, dans la collection Ailleurs et Demain de Robert Laffont. Une collection de romans de science-fiction qui avait une particularité visuelle : leurs couvertures.
Celles-ci semblaient être faites en alu brossé. Elles étaient chatoyantes comme les combinaisons futuristes des Bogdanov dans leur émission Temps X. Quand on est au collège, cette imagerie-là qui raconte ton futur probable te marque.

La première parution de cettte collection Ailleurs et Demain avec leur couverture signature métallisée, sort en 1969. L'aluminum brossé était à l'époque synonyme d'industrie triomphante, propre, lumineuse, performante, issue de l'aéronautique, du spatial, voire d'avenir. Le couturier Paco Rabanne a habillé avec cette matière ses hotesses d'un voyage vers le futur, comme il a utilisé les plastiques colorés pour ses mêmes modèles. Et l'alu brossé fut l'habillage élégant pour les appareils hi-fi haut de gamme des meilleures marques japonaises et allemandes, qu'on va retrouver jusque dans les années 1980s avant le sombre règne du plastique noir.

Oui, ces couvertures argentées fit briller la littérature de genre au même moment que les premiers émois amoureux d'étudants sur les pavés de Mai 1968, ou que les Américains mirent un premier pas sur la Lune. L'avenir s'annonçait chatoyant dans l'espace des possibles ! Et ces couvertures changeantes devirent iconiques des dizaines d'années.

Le procédé en question s'appelle héliophore : une fine couche d'aluminium gauffré par des rainures au centième de millimètre (très exactement 24 par millimètre), que l'imprimeur de Robert Laffont contrecolle sur papier fort. Ce procédé est créé par Louis Dufay dans les années 1930s, un inventeur français méconnu, pionnier du cinéma couleur où il y fit une petite fortune, ce qui lui permit de constituer une des plus grandes collections de papillons de l'époque. Et justement, son idée de gravures très fines sur aluminium est un biomimétisme, une invention inspirée de la nature, des ailes de Morpho retenor, chatoyants papillons bleus d'Amérique du Sud. Quand ces lépidoptères battent leurs ailes, celles-ci reflètent différemment la lumière suivant l'angle.
La très fine couche d'aluminium est imprimée d'un motif de gravures très fines, sillons parallèles dont les angles et donc la réflection changent, ce qui donne cet impression de contraste dans le jeu de lumière et fait donc apparaitre un dessin abstrait, souvent un motif géométrique, ou une illusion de mouvement selon l'angle. L'héliophore est le médium d'un art cinétique qui sera plus tard prisé dans les PLV (publicités sur lieux de ventes). Mais son inventeur ne le saura jamais : Louis Dufay meurt subitement en 1936, 4 ans après avoir déposé le brevet. Sa famille va perpétuer son héritage en fondant Imprim'Hélio, entreprise spécialisée dans le procédé.

Les couvertures des livres dans la collection Ailleurs et Demain vivent donc à la lumière : suivant l'angle d'où vous les regardez, on a un jeu visuel, ce qui intrigue l'œil et fait croire au cerveau qu'il existe d'autres dimensions. Imaginez comment ces livres exposés en vitrine de librairie attrapaient le coin de l'œil du chaland. Et chaque roman publié dans cette collection eu droit à sa couverture avec ses formes abstraites, chacune était une véritable sculpture.

Pardon, c'est pas chaque roman, mais chaque édition d'un roman.
À tel point qu'il existe sur un forum spécialisé bande-dessinée et science-fiction, une belle collection de photo desdites couvertures.
Alors oui, je sais, que cela soit en photo ou en scan, ces images ne rendent pas l'effet saisissant, mais elles ont le mérite de donner l'idée de ces merveilles d'art moderne technologique avec des motifs en spirale, en damier, en cercles concentriques, en vagues… de couleur argent ou or.
Si vous n'aviez jamais eu l'occasion de voir ces fantastiques ouvrages (dans tous les sens du terme), je ne peux que vous recommander le documentaire sur Louis Dufay.

Ce qui donna envie à l'éditeur Gérard Klein d'illustrer ainsi sa collection de science-fiction, fut son usage par Philips pour un label de musique concrète dans les années 1960s, avec notamment le Groupe de Recherche Musical de l'ORTF (détail qui plaira aux amis de l'émission Mirage sur Radio <FMR>). Et pour son film inachevé « Enfer », le réalisateur Henri Georges Clouzot déplace son équipe chez l'imprimeur et va filmer Romy Schneider sur un décor en héliophore, faisant tournoyer des spots de couleurs vives pour exprimer la folie.
Encore de l'expérimental, et de la production en marge du conventionnel.

Et du coup, l'héliophore va exprimer une vague Pompidoupunk : le procédé est directement lié aux foisonnantes Trente Glorieuses et à l'expérimental, mais du coup, il va vieillir dans l'imaginaire collectif d'un grand public marqué à partir de 1974 par la crise pétrolière et le chômage de masse.

Faisant ce constat, les couvertures héliophores sont abandonnées par les éditions Robert Laffont en 1990. Mais un hommage sera fait par le même éditeur en 1998 qui va mettre les titres de sa collection Ailleurs et Demain dans un cartouche au reflets holographiques. Il reviendra brièvement en 2009 à ce procédé pour les 40 ans de la collection, mais celui-ci étant très cher, il sera à nouveau abandonné. Désuet car trop fragile et coûteux, et aussi compliqué à recycler qu'une brique de Tetrapak.

Mais comme je le répète souvent : la science-fiction est le genre qui se périme le plus vite, tout en étant un laboratoire virtuel de nos technologies.

Et en préparant cette chronique, j'ai appris que Robert Laffont, pour le film et surtout le cinquantenaire et de la saga « Dune » et de sa collection Ailleurs et Demain, avait un temps songé à ré-utiliser ce procédé lumineux pour une édition collector en 2020.

Alors pour arriver à la fin de cette chronique, vous savez que dans cette émission, on expérimente parfois ce dont on cause dedans.
Le procédé d'héliophore utilise une gravure d'environ un vingt-quatrième de milimètre. Mais si on va plus bas, disons 300 gavures par milimètre, on est dans la longueur d'onde de la lumière visible. Et là, il se passe un étrange phénomène : figurez-vous que le spectre de lumière blanche va rebondir bizarrement en fonction de sa longueur d'onde, se diffracter, et partir en arc-en-ciel, dévoilant tout son spectre de couleurs. C'est le phénomène de l'holographie due à la modulation de surface. Un peu comme la surface d'un CD, et exactement le même procédé qui est utilisé comme mesure de protection sur les billets de banque.

Et ben figurez-vous qu'on s'est amusés avec une feuille de papier dite holographique : On a voulu faire du chocolat holographique, d'après une idée de Laurence Vagner alias Hellgy : Vous faire fondre au bain-marie du chocolat pâtissier noir, et vous répandez des grosses gouttes sur le papier holographique (environ 10 € la dizaine, trouvable en magasin d'art). Vous laissez refroidir et vous décollez, et normalement, le motif holographique s'est moulé sur le chocolat, qui se met donc à briller comme un arc-enc-el.

Alors oui, euh, on est en été, c'est pas une super idée car ça tient pas longtemps mais… rien n'est pire qu'avoir voulu faire cette expérience avec un papier qui semble être vernis : nos chocolats sont lisses, l'expérience a foiré. Flûte !

Texte : Da Scritch
Co-productrice culinaire : Enflammée
Photo : Couverture en héliophore, CC-By Da Scritch.

Pièces jointes

  • 0191-CPU-Artefact-Heliophore(23-06-22).mp3

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